… Encore. Dire encore. Soit dit encore. Tant mal que pis encore.
Jusqu’à plus mèche encore. Soit dit plus mèche encore. Dire pour soit dit. Mal dit…
Samuel Beckett, extrait de Cap au pire.
C’est d’abord un grand désir de théâtre qui est à la base de ce projet. Celui d’écrire un spectacle, en collectant des morceaux, des moments de plateau, associés à plusieurs textes que j’avais rassemblé. Nous nous sommes isolés deux mois avec un groupe d’acteurs. Nous avons expérimenté, construit, déconstruit jusqu’à accumuler des heures de propositions scéniques. A l’origine il y avait déjà un titre : Je voulais que nous parlions de la nuit, de l’obscurité, de l’ombre. Des textes assez radicaux se sont imposés à nous, pas toujours simples à traiter, qui abordaient des sujets comme la mort, la douleur, l’emprisonnement… Nous avons tenté de les aborder à notre mesure, mais avec un souci constant de la forme et de l’esthétique. Nous avons également fait en sorte de travailler sur le pendant opposé de certains de ces thèmes, la mort/la vie, la gravité/la futilité…
Plusieurs textes se sont imposés :
– Vole mon Dragon d’Hervé Guibert : Une pièce qui traverse trois temps : l’enfance, la jeunesse, l’âge adulte. La figure d’un homme face à sa peur de la mort et la sublimation du désir pour tenter de la vaincre.
– Mon grain de sable de Luciano Bolis : roman autobiographique d’un résistant italien emprisonné puis torturé. Face à l’insoutenable, il n’a plus qu’une solution pour ne pas céder et révéler l’identité de ses camarades : tenter de se suicider. C’est l’histoire de son combat héroïque et terrifiant pour mourir qui nous est raconté. La précision de ce récit, l’humilité et la lucidité de son auteur font de ce témoignage un texte poignant.
– Cap au pire de Samuel Beckett. Un des derniers textes de Beckett. Un texte qui parle de la limite d’un texte avant qu’il ne devienne un cri. Un texte qui fait nécessairement appel au corps. ça parle du pire. Un pire qui dépasse l’homme et qui doit être dit. Coûte que coûte.